
Notre ambition pour le prochain budget de l'Union Européenne
Europe
France Digitale profite des consultations de la Commission Européenne sur le "Financement de l'UE pour la compétitivité" et "Performance du budget de l'UE" pour adresser un message fort : l'Europe doit se donner les moyens de ses ambitions et permettre la réussite des champions européens de l'innovation et de la tech pour assurer notre position sur la scène mondiale et notre prospérité à long terme.
France Digitale profite des consultations de la Commission Européenne sur le « Financement de l’UE pour la compétitivité » et « Performance du budget de l’UE » pour adresser un message fort : l’Europe doit se donner les moyens de ses ambitions et permettre la réussite des champions européens de l’innovation et de la tech pour assurer notre position sur la scène mondiale et notre prospérité à long terme.
Aujourd’hui, contrairement à l’agriculture, au commerce, à la concurrence et (pour la zone euro) à la politique monétaire, les politiques industrielles et d’innovation n’ont jamais vraiment été coordonnées au niveau de l’UE. Si l’opportunité d’une politique industrielle européenne reste à débattre, il est indéniable que ce manque de coordination s’est traduit par deux décennies de financement limité et dispersé de l’UE en faveur de l’innovation. Cette situation a souvent entraîné des doublons ou des recoupements avec les programmes nationaux, des liens insuffisants avec la recherche et l’absence de mesures claires de la réussite des programmes de financement.
Si le financement de l’UE par l’intermédiaire du groupe de la Banque européenne d’investissement a joué un rôle clé dans la structuration du secteur européen du capital-risque, le financement direct des startups par le budget de l’UE a eu un impact moins structurel. Dans les deux cas, la vision, les montants et les instruments en place n’ont pas (encore) suffi à faire de l’Europe la région la plus compétitive et la plus innovante du monde dans le domaine du capital-risque.
Pour combler ce retard, France Digitale formule des recommandations visant à améliorer l’impact et l’efficacité des fonds de l’UE consacrés aux entreprises innovantes, notamment les startups et leurs investisseurs, sur la base de notre expérience de terrain et celle de nos membres.
Nous sommes conscients que ces améliorations ne suffiront pas, à elles seules, à atteindre l’objectif commun de faire de l’Europe un marché compétitif au niveau mondial et un leader dans la prochaine génération d’innovations.
Nous avons besoin d’une politique européenne de l’innovation forte et coordonnée, qui définisse une vision claire et une orientation commune pour les financements nationaux et européens. Pour nous, l’objectif est clair : contribuer à l’émergence de champions européens de la technologie.
À cette fin, les budgets de l’UE et de la BEI devront également être coordonnés avec d’autres instruments de politique macroéconomique : la concurrence, le commerce, la recherche et la politique monétaire, voire, à terme, les politiques fiscales nationales.
Ce n’est qu’à cette condition que nous pourrons transformer l’innovation d’une petite ligne budgétaire en un outil stratégique de la politique macroéconomique européenne au service de notre vision d’une Europe compétitive et prospère.
Le résumé de nos recommandations
- La Banque Européenne d’Investissement (BEI) et le Fonds Européen d’Investissement (FEI) jouent un rôle structurel pour les VCs, tandis que le financement direct européen a un impact moindre pour les start-ups.
- Le financement de l’UE est considéré comme un complément au financement national, plus accessible et prévisible.
- Le FEI en tant qu’investisseur, rassure les autres (potentiels) investisseurs, mais le processus de due diligence est long (jusqu’à 18 mois) et les rapports sont coûteux en termes de temps et de capital humain. En outre, les priorités d’investissement politiques limitent les investissements secondaires et la liquidité, essentiels pour les investisseurs.
- Seuls 5 % du budget des programmes-cadres de l’UE pour la recherche et l’innovation (Horizon Europe, Digital Europe) sont alloués aux startups.
- Aucune des startups interrogées n’a bénéficié du programme Digital Europe.
- Les consortiums sont difficiles à créer pour les startups.
- Les subventions sont utiles à un stade initial et pour la R&D, mais moins pour la croissance sur le long-terme.
- Les garanties et les prêts de la BEI sont peu connus et sous-exploités. Ils sont conçus pour les grandes entreprises et ne sont pas adaptés aux scaleups.
- Le Conseil européen de l’innovation (EIC en anglais) est apprécié, en particulier sa procédure de candidature en deux étapes qui allège la première phase de la démarche. Mais son taux de réussite n’est que de 5 %.
Nos positions sur le budget du CFP (Cadre Financier Pluri-annuel)
- Il faut renforcer les chaînes d’approvisionnement pour réduire la dépendance :
- l’économie circulaire peut réduire la dépendance à l’égard de l’importation de matériaux rares
- l’augmentation de la commande publique de technologies de l’UE peut également réduire la dépendance stratégique en matière technologique
- Le financement des priorités urgentes (ex. la défense) ne doit pas se faire au détriment des objectifs à long terme (transition verte et numérique)
- Compte tenu de sa capacité limitée, le budget de l’UE devrait compléter les financements nationaux et privés lorsqu’il existe des failles dans le marché, en réduisant les risques et en renforçant la confiance.
- Il est primordial de communiquer de manière claire et cohérente sur le nombre et la nature des fonds qui financent les mêmes priorités, ainsi que sur les performances du budget de l’UE jusqu’à présent. Éviter les changements des noms des initiatives, car cela cause de la confusion pour les entreprises (InvestAI utilise les fonds Horizon Europe et Digital Europe, Choose Europe utilise également Horizon Europe).
- Il est nécessaire d’augmenter le budget de l’EIC
- Privilégier la commande publique par rapport aux subventions : cela apporte de la liquidité aux entreprises ainsi que des références précieuses par rapport à d’autres potentiels clients.
- Exiger des grandes entreprises recevant des fonds publics qu’elles appliquent une préférence européenne en matière d’achat d’innovations et de technologies.
- Le succès des programmes devrait être mesuré en fonction des résultats (y compris les critères de viabilité commerciale et financière) plutôt qu’en fonction des processus utilisés et des reportings.
- Il est nécessaire de dépasser le cadre des subventions et ainsi élargir les instruments financiers pour un retour sur investissement à long terme.
- Expliquer les raisons de la sélection des gagnants et de l’exclusion des perdants, clarifier ce qui peut être amélioré afin que les candidats soient motivés pour postuler à nouveau. Distribuer des labels d’excellence aux bons candidats pour les encourager à se représenter après un échec.
- Réduire la charge administrative pour éviter le recours systématique à des sociétés de conseil.
- Veiller à ce que la gestion et l’évaluation des appels soient confiées à des experts dans le domaine des candidats (BEI ou EIC).
- Entrer tôt dans les fonds d’investissement afin que l’engagement du FEI puisse servir de référence pour les autres investisseurs.
- Poursuivre et étendre les programmes d’InvestEU, fournir plus de clarté aux sociétés de capital-risque à ce sujet.
- Établir des points de contact clairs pour les sociétés de capital-risque au sein du FEI.
- Supprimer l’exigence d’un ratio public/privé fixe ou établir un système à deux tranches.
- Assouplir la règle des 60/40 afin de permettre une plus grande flexibilité pour les investissements secondaires.
- Utiliser l’effet de levier du FEI pour attirer davantage d’investisseurs institutionnels vers les VCs européennes :
- Créer une initiative européenne de VCs (EU VC Initiative) : un fonds de fonds géré par le FEI qui met en commun les ressources des fonds de pension, d’assurance et d’épargne.
- Mettre en relation les VCs européens avec les investisseurs institutionnels européens par le biais de matchmaking, par exemple.
- Communiquer davantage sur l’impact de l’activité du fonds de fonds du FEI afin d’attirer et de rassurer les investisseurs privés.
- L’Initiative européenne Tech Champion 2 ne devrait plus appliquer le seuil d’éligibilité de 1 milliard d’euros d’actifs sous gestion. 87 % des VCs français ont moins d’1 milliard d’euros d’actifs sous gestion.
- Inclure la « santé » parmi les domaines reconnus dans les reportings ESG pour obtenir les fonds européens. Les solutions de santé ont un impact social positif.
- Faciliter et accélérer l’engagement des investisseurs individuels, harmoniser les différents délais de traitement des autorités nationales des marchés financiers.